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Intégration de l’art-thérapie à l’accompagnement. Entretien avec Lola Dupuy, travailleuse sociale et art-thérapeute.

Une part de l’originalité de l’accompagnement social chez Comme les Autres tient au profil et parcours des travailleurs sociaux que nous recrutons. Lola, travailleuse sociale en région Auvergne-Rhône-Alpes, en est une illustration. Elle a rejoint Comme les Autres après une formation en art-thérapie et plusieurs expériences auprès de publics précarisés et / ou cérébrolésés. Aujourd’hui, elle invite le théâtre, l’écriture et de nouvelles approches de soin au sein de l’accompagnement.

Un atelier d'écriture dans la région de Lyon en mai 2021
Un atelier d'écriture dans la région de Lyon en mai 2021Afficher la vidéo
Un atelier d'écriture dans la région de Lyon en mai 2021

Bonjour Lola, tu es travailleuse sociale chez Comme les Autres et tu as une formation d’art-thérapeute et de théâtre, peux-tu nous raconter ton parcours ?

J’ai commencé par un parcours de comédienne : j’ai fait une école de théâtre et j’ai joué dans des troupes jusqu’à mes 20 ans. Puis, je me suis rendue compte que je voulais être dans l’accompagnement et que je voulais me servir du théâtre pour cela. J’ai alors fait un master d’art-thérapie à Paris. Cela m’a amené à faire plusieurs stages dans le médico-social (en prison, dans des foyers, etc.) ce qui m’a permis de mieux comprendre les outils de l’art-thérapie théâtre que sont l’improvisation, l’écriture et les marionnettes.

J’ai ensuite travaillé en libéral auprès d’enfants atteints de troubles du comportement ainsi qu’en centre d'activités de jour avec des personnes cérébrolésées sur la mobilisation de toute la sphère cognitive (langage, mémoire, apprentissage), sur la redécouverte des émotions et sur le schéma psycho-corporelle. En tant qu’art-thérapeute, mon accompagnement était intégré au parcours de soin et je travaillais avec plusieurs autres corps de métiers : des éducateurs spécialisés, des médecins, des psychomotriciens, etc. J’ai rejoint Comme les Autres en 2020. 

Peux-tu nous expliquer en quoi consiste l’art-thérapie, une thérapie innovante encore méconnue du grand public ?

Il s’agit d’accompagner par le biais du processus créatif une personne dans ses difficultés psychologiques ou psycho-corporelles. C’est le processus en lui-même qui est thérapeutique en ce qu’il libère la parole et permet une prise en compte introspective de ses troubles ou difficultés.

L’art-thérapie est une façon de parler de soi sans dire « je » et qui va permettre à la personne accompagnée de se “re-créer”, et ainsi tenter de transformer le handicap (ou maladie, etc.) en enrichissement personnel.

L’art-thérapeute peut intervenir dans les domaines de la santé, du social et de la pédagogie.

Quels sont selon toi les apports spécifiques de l’art-thérapie au public accidenté que nous accompagnons ?

Le traumatisme, en l'occurrence l’accident, remet en question l’intégrité physique et psychique de la personne. Il vient paralyser toute son organisation identitaire. On appelle ça la dissociation psychique. Elle peut s’associer à des troubles de stress post-traumatique : dépression, anxiété, phobies, douleurs corporelles, etc. Ce que j’ai rapidement remarqué, c’est que peu de personnes étaient accompagnées sur la restauration de l’image psycho-corporelle, des émotions, etc. 

Et c'est souvent très compliqué pour les personnes devenues handicapées moteur suite à un accident de verbaliser leurs affects. J’observe beaucoup de déni. C’est normal, cela fait partie du processus de résilience. Parce que tout d’un coup, ils se retrouvent en posture de victimes, en situation de devoir demander de l’aide et il est très difficile d’accepter cette nouvelle situation qui arrive très brutalement.

C’est là que l’art thérapie intervient, c’est un super outil pour ce public car il permet de détourner de la verbalisation. Le fait de verbaliser peut en soi être traumatisant car cela donne à l’événement une réalité hyper violente. Avec le théâtre ou les autres médias, on va pouvoir travailler autour de l’accident, sur ce qu'il a bousculé du rapport à soi et aux autres, en ayant recours au symbolisme et à l’imaginaire pour ne pas risquer de réveiller le traumatisme.

Peux-tu nous donner des exemples d’ateliers proposés au sein de Comme les Autres qui s’appuient sur l’art thérapie ?

Au travers des ateliers que je propose, j’invite les bénéficiaires à travailler sur leurs émotions pour accéder à une meilleure compréhension d’eux-mêmes.

Plutôt que d’utiliser la scène, j’ai préféré commencer par un atelier d’écriture créative où il s’agissait à travers diverses consignes d’exprimer ses souffrances. L’intérêt de l’écriture est qu’elle laisse à chacun le temps dont il a besoin, avec une certaine maîtrise des émotions.

Elle a ça de bien également qu’elle active l’espace psychique en invitant à trouver le bon mot, mobiliser la bonne connaissance et ce processus de recherche est une première dynamique. Par ailleurs, il n’y a pas de recherche de beau ni de vérité. Chacun exprime ce qu’il a besoin d’exprimer.

A travers cet atelier, un des bénéficiaires s’est par exemple rendu compte qu’il était complètement coupé de ses émotions. Il s’en est rendu compte par comparaison avec les textes des autres.

“En sublimant la souffrance, en la transformant en oeuvre d’art, l’écriture donne du sens à l’incohérence, au chaos, comble le gouffre de la perte (dans le cas de la mort d’un enfant, par exemple, comme chez Victor Hugo) et crée un sentiment d’existence. De simple témoin impuissant, l’auteur devient créateur de ce qu’il raconte. Nous, les humains, nous pouvons souffrir deux fois : une première fois lors du coup que nous recevons dans le réel, puis une seconde fois lors de la représentation du coup. Écrire nous oblige à nous décentrer pour faire du trauma une représentation remaniée.” Boris Cyrulnik

Quels sont les bienfaits escomptés de ce travail ?

Parmi les bénéfices, on peut espérer une meilleure gestion des émotions et une amélioration de l’estime de soi.

Ensuite, l’art-thérapie permet de travailler sur l’image de soi. Par exemple, à travers l’interprétation d’un personnage ce qui va permettre de sortir de l’image fixe dans laquelle on est quotidiennement.

Enfin, ces ateliers ont ouvert d’autres possibles : suite aux sessions d’art-thérapie, les bénéficiaires m’ont rapporté s’être plus facilement investis dans de nouvelles activités et dans de nouveaux espaces (association de loisirs, association handisport, nouveaux espaces sociaux, etc). Ces ateliers d’art-thérapie ont permis d’expérimenter en toute sécurité le fait d’aller se confronter à l’inconnu et comme le résultat a été positif, cela leur a donné envie de renouveler l’expérience.

Est-ce que tu aurais un souvenir d’accompagnement à partager ?

Oui, ce serait les retours que l’on a reçus suite à l’atelier d’écriture. Les participants m’ont dit qu’ils avaient apprécié de pouvoir se livrer à travers leurs textes et qu’ils s’étaient sentis liés entre eux de manière profonde et authentique alors même qu’ils ne s’étaient découverts que par leurs écrits. Et puis un bel accomplissement également : celui de pouvoir lire ces textes à une comédienne qui joue un spectacle sur la douleur et dont nous sommes, par la suite, allés voir le spectacle.

Quelles sont les perspectives de développement au sein de Comme les Autres ?

Après ces ateliers d’écriture, j’aimerais les emmener vers la scène avec l’improvisation théâtrale et la mise en récit. Cette continuité permettrait en deuxième phase, d’aller plus loin vers la capacité à se projeter, à se repenser, à être en confiance avec soi-même et l’autre. Il s’agirait de construire un programme sur 6 ateliers : 3 séances d’écriture puis 3 séances sur scène.



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L’accompagnement individuel des bénéficiaires est uniquement possible grâce à la collaboration du couple Travailleur social – Responsable d’Antenne. Julie Pichenot, Responsable d’Antenne en IDF, nous raconte les dessous de son métier.

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